Récit de voyages / « Boundless »

Au Moyen-Âge, les récits de voyage étaient des récits de quête, une succession de découvertes, des narrations fidèles à l’expérience ou au contraire entièrement reconstituées d’après souvenirs. On dit que c’est un genre littéraire difficile à cerner. Il témoigne d’un bouleversement de la pensée occidentale : l’expérience de ce qui est autre, et de l’Autre. En découle une esthétique du fragment et du discontinu, faite de bribes, d’impressions glanées à la marge, de descriptions d’après mémoire à la limite de la digression.

Ces récits de voyage ont construit notre imaginaire collectif. Quand mes amis partent en voyage, je leur demande de m’envoyer une carte postale. Pas de photo, juste quelques mots. Ils me racontent leurs images : celles qu’ils voient, celles qu’ils vivent. Ils sont voyageurs-écrivains, je deviens photographe-voyageur. Mais, dans mon récit, je décide de partir à la découverte d’un monde originel. Comme les Amériques au XVIIIe siècle, mon corps, ces quelques centimètres carré de peau, devient une territoire débordant. Je me sers de leurs mots pour voir les images que je recrée au creux de ma chambre. J’explore mon corps indigène qui devient un théâtre romantique sans limite. Je surplombe des paysages où l’infini rejoint l’invisible. Qu’importe si le monde est déjà connu puisque mon regard est singulier. Je vie l’aventure pleinement au moment où le miroir de mon appareil photo se lève. C’est un ailleurs intra-ordinaire. J’en rapporte des images-mirages, picturales et sans âges où votre imaginaire s’active.

Claire Jolin, janvier 2014

Texte librement inspiré des recherches
d’Agnès Lefillastre,
professeur en Lettres modernes

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